Pendant des décennies, le système d’enseignement technique en République de Guinée, dans le secteur sportif, a formé essentiellement des professeurs d’éducation physique. Cette approche, héritée d’une logique scolaire traditionnelle, a longtemps limité, voire réduit, la portée économique du sport. Or, le sport, de nos jours, est bien plus qu’une activité physique ou éducative ; c’est une véritable industrie qui, lorsqu’elle est structurée, génère des emplois, attire des investissements et crée de la valeur.
Dans de nombreux pays, la transformation est déjà en cours, et même, elle a été déployée depuis des années. Chez nos voisins sénégalais et ivoiriens, des instituts de formation aux métiers du sport existent. Des filières de formation spécialisées ont vu le jour dans le management sportif, le marketing, la communication, le droit appliqué au sport ou encore la médecine sportive, pour ne citer que celles-ci. Il y a même des universités qui proposent des MBA en sport.
Ces filières produisent des profils capables de gérer des structures sportives et de les rendre professionnelles, de négocier des contrats de sponsoring, d’organiser des événements internationaux ou encore d’innover dans le sport business.
C’est grâce à de telles visions que des fédérations, des ligues et des marques sportives africaines commencent à se faire une place et à s’imposer sur la scène mondiale. Notre système d’enseignement professionnel doit s’ouvrir à ces filières, à travers l’École nationale d’éducation physique et sportive, pour permettre à nos passionné(e)s de sport de se professionnaliser, d’embrasser l’innovation et de structurer un secteur qui pourrait fortement contribuer à la lutte contre le chômage, la délinquance juvénile et la migration irrégulière.
En République de Guinée, le potentiel est immense. Le pays regorge de talents, de passionnés et de jeunes prêts à s’investir dans le sport. Ce qui manque, c’est une infrastructure de formation adaptée aux réalités du secteur, des programmes de formation ou de renforcement de capacités de niveau standard, ainsi que des orientations stratégiques pour des carrières professionnelles.
Il est temps de repenser la place du sport dans l’enseignement technique et supérieur, en diversifiant les filières au-delà de l’éducation physique, en intégrant des modules orientés vers le management, la gestion, la médecine sportive, le coaching professionnel, la communication, la diététique et l’événementiel, et en créant de véritables passerelles entre la formation et le monde professionnel.
Cette réforme n’est pas une utopie académique. Elle répond à un besoin concret : celui de préparer une génération de professionnels capables de transformer le sport en une activité génératrice de revenus, créatrice d’emplois et productrice de ressources humaines qui porteront des réflexions pour développer le secteur.
Dans un contexte où la jeunesse représente la majorité de la population guinéenne (70 % si je ne me trompe pas), il est stratégique d’ouvrir de nouveaux horizons économiques au-delà des secteurs classiques. Le sport peut devenir l’un des piliers économiques majeurs s’il est accompagné d’une vision claire, d’une volonté politique forte et d’un système éducatif en phase avec son époque.
Il est temps que les décideurs prennent la mesure de l’enjeu : former autrement dans ladite école pour faire du sport une véritable usine de talents, capables de briser la malédiction d’un secteur qui consomme énormément mais produit peu de résultats. Pour cela, la refonte de l’École nationale d’éducation physique et sportive, pour en faire une institution qui forme aux métiers du sport, doit être l’une des priorités des ministères en charge de l’éducation, plus précisément de l’enseignement technique, de la formation professionnelle et de l’emploi.
Cheick Alpha Ibrahima Camara (Alpha le Sérum)
Entrepreneur | Gestionnaire de projets | Consultant en Industries Culturelles et Créatives
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